Mondiale: La Campagne mondiale pour une réforme visant à renforcer l'architecture de l'égalité des sexes (Campagne GEAR)
Les thèmes de l’égalité des sexes et des droits de femmes ne faisaient originellement pas partie du mandat du Groupe et n’ont été inclus que sous la pression exercée par des groupes nationaux et internationaux de femmes auprès de Kofi Annan pour que soient abordées les questions relatives à l’efficacité de l’architecture actuelle en matière de genre. Durant la réunion de mars 2006 de la Commission de la condition de la femme, des groupes de femmes ont, par exemple, publié une Lettre ouverte au Secrétaire général et aux états membres soulignant l’importance et regrettant l’absence de questions relatives à l’égalité des sexes dans le mandat initial du Groupe. Cette lettre ouverte a été suivie d’une série de déclarations régionales et de rapports présentés par des réseaux de femmes du monde entier dans lesquels celles-ci formulaient des propositions et des recommandations sur la façon dont la réforme des Nations Unies pourrait mieux servir les femmes. [ii] En raison notamment des préoccupations des défenseurs des droits des femmes à l'échelon mondial, le mandat du Groupe a été élargi de manière à aborder l'analyse de l'architecture de l'égalité des sexes et l’intégration de la perspective de genre.
En quoi consiste la Campagne GEAR?
Sous la houlette de l’Organisation des Femmes pour l'Environnement et le Développement et du Centre pour le leadership mondial des femmes (CWGL), cette campagne vise la création d'une institution plus forte pour les femmes au sein des Nations Unies, entièrement financée pour pouvoir répondre aux attentes et produire des résultats, dirigée par un-e Secrétaire général-e adjoint-e et caractérisée par une forte présence sur le terrain, qui soit responsable aux niveaux national et mondial et soucieuse de promouvoir l’intégration de la perspective de genre dans tout le système des Nations Unies ». [iii]
Dans leur première présentation au groupe, WEDO et CWGL ont décrit les succès et les échecs du système actuel des Nations Unies dans le traitement de l'égalité entre les sexes et ont formulé plusieurs propositions de réforme susceptibles de faciliter les résultats positifs pour l'autonomisation des femmes. Cette proposition, signée par 116 organisations et réseaux de femmes a constitué le point de départ d'une campagne de plaidoyer qui a continué depuis 2006. Ce mouvement est progressivement devenu plus organisé, avec la signature de plus de 270 organisations et réseaux de femmes et a été officiellement présenté comme la Campagne mondiale pour une réforme visant à renforcer l'architecture de l'égalité des sexes ou Campagne GEAR en février 2008, durant la 52e session de la Commission de la condition féminine. [iv]
La Campagne GEAR et les jalons du processus de réforme
La réforme de l'architecture de l'égalité des sexes aux Nations Unies a toujours été un chemin semé d'embûches. Depuis la création du Groupe début 2006 et jusqu'à l'heure actuelle, mi-2008, les organisations des droits des femmes ont tenu bon et ont pesé de tout leur poids dans ce processus de réforme qui revêt la plus haute importance pour l'avenir de l'égalité des sexes, même s’il y a encore du travail à faire.
Le premier grand jalon du processus de réforme a été la publication de « Unis dans l’action: rapport du groupe de haut niveau du Secrétaire général » [v]. Ce rapport, paru en novembre 2006, contenait d'importantes informations pour les défenseurs des droits des femmes. Des organisations de femmes du monde entier ont collaboré pour s’assurer que le Groupe formule des recommandations substantielles sur le renforcement de l'architecture de l'égalité des sexes aux Nations Unies.
Comme mentionné plus haut, WEDO et CWGL ont effectué leur première présentation au groupe en juillet 2006 ; ils y analysaient les carences du système actuel et proposaient une nouvelle architecture de l'égalité des sexes qui corresponde aux besoins de l'égalité des sexes et de l'autonomisation des femmes. Le principal message de cette présentation était que la nouvelle institution de l'égalité des sexes:
«… devait être une institution solide, spécifiquement consacrée aux questions féminines et agissant de façon transversale dans tout le système des Nations Unies, une institution qui soit en mesure de conduire, de surveiller et d'agir comme cheville ouvrière ou comme élément catalyseur de la promotion de l'égalité des sexes des droits des femmes aux échelons mondial et national. Cette institution spécifiquement consacrée aux questions féminines dans tout le système doit s'acquitter de trois grandes fonctions : elle doit avoir des responsabilités de prise de décisions politiques sur des aspects de fond liés à l'égalité des sexes et aux droits des femmes ; elle doit avoir la capacité d'effectuer un suivi, et la faculté de garantir la responsabilisation en ce qui concerne l’intégration de la perspective de genre dans tout le système des Nations Unies. Finalement, elle doit avoir une présence sur le terrain pour mener à bien et orienter les activités opérationnelles des Nations unies de façon à ce que la programmation en matière d'égalité des sexes et de droits des femmes soit effectivement suivie. » [vi]
Fin août 2006, CWGL et WEDO ont envoyé une fiche d'information aux membres du groupe pour attirer à nouveau leur attention sur leur message central avant que le Groupe ne finisse d'élaborer ses recommandations au Secrétaire général. Cette action de plaidoyer a finalement porté ses fruits puisque le rapport final formule d'importantes recommandations sur l'égalité des sexes qui interprètent la plupart des préoccupations exprimées par les mouvements des droits des femmes.
C'est ainsi que, reflétant les efforts des mouvements des femmes dans le monde entier, le Groupe indique dans son rapport qu’il « recommande la création d'une nouvelle fonction de haut niveau pour le Secrétaire général adjoint en matière d'égalité des sexes à la tête d’une institution qui viendrait consolider les trois départements actuels des Nations Unies dans ce domaine: l'UNIFEM, la Division de la promotion de la femme (DAW) et le Bureau de la Conseillère spéciale pour la parité des sexes et la promotion de la femme (OSAGI). La nouvelle institution centrerait son action à l'échelon mondial et sur le plan politique et mettrait davantage l'accent sur l'égalité des sexes au niveau opérationnel et des pays.» [vii]
Le deuxième jalon important du processus de réforme ne s'est pas encore matérialisé: il s'agit de l'acceptation de l'Assemblée générale et de l'adoption de mesures conformes aux recommandations du Groupe. Peu après la publication du rapport final du Groupe à la fin 2006, la campagne GEAR a rapidement commencé à élaborer une déclaration demandant l’adoption rapide et la mise en oeuvre des recommandations du Groupe sur l'architecture de l'égalité des sexes aux Nations Unies. Toutefois, l’Assemblée générale n'a pas encore pris de décision à propos de l'architecture de l'égalité des sexes. Au départ, tous les acteurs s'attendaient à ce que le processus intergouvernemental soit achevé pour la fin de la 61ème session mais les recommandations du Groupe n'ont pas reçu le soutien des états membres.
Ceci dit, plusieurs mesures ont néanmoins été adoptées depuis lors afin de faire avancer les choses. Répondant à une demande d’informations additionnelles de la part du Président de l'Assemblée générale, le Secrétaire général adjoint a publié en août 2007 une Note conceptuelle sur le renforcement de l'architecture de l'égalité des sexes sur la base d'un processus de consultation auprès d'un Groupe spécial interinstitutionnel sur l'égalité des sexes. Les membres du Groupe spécial se sont accordés à reconnaître que « l'architecture actuelle en matière d'autonomisation des femmes et d'égalité des sexes est fragmentée et sous-financée et n'est donc pas en mesure de répondre effectivement au mandat de l'Assemblée générale sur les questions des femmes et de l'égalité des sexes. » [viii]
Au cours de sa 62ème session (septembre -- décembre 2007), l'Assemblée générale a relancé le débat sur la réforme, mais la question de l'égalité des sexes n'a pas été envisagée avant les consultations de mai 2008. Les allées et venues ont continué entre l'Assemblée générale et le Secrétaire général et une nouvelle Note sur l'égalité des sexes a été publiée en juin 2008 [ix], ainsi qu'une Note conceptuelle finale, qui vient d'être publiée (23 juillet 2008), proposant diverses options institutionnelles pour l'architecture de l'égalité des sexes [x]. Parallèlement à l'action menée au sein de l'Assemblée générale, la campagne GEAR a présenté une déclaration à la 52ème session de la Commission de la condition de la femme (CSW). À l'issue de la session, en mars 2008, il était clair que la réforme et l’amélioration d'une architecture de l'égalité des sexes aux Nations unies faisait l'objet d'un soutien majoritaire. « Dans les présentations nationales, plus de 40 pays ont exprimé la nécessité de renforcer les mécanismes institutionnels des Nations Unies sur l'égalité des sexes et ont exhorté à la création d’une institution consolidée de femmes dirigée par un-e Secrétaire général-e adjoint-e et fortement ancrée à l'échelon national. » [xi]
Quelles sont les prochaines étapes du processus ?
Tous les états membres ont reconnu l'importance de l'égalité des sexes et la nécessité de mettre en oeuvre des politiques dans ce domaine, sans pour autant se mettre d'accord sur l'application des actions spécifiques recommandées par le Groupe. Les trois options institutionnelles proposées par le Secrétaire général impliquent la consolidation de l’UNIFEM, de l’OSAGI, de la DAW et de l’INSTRAW, et sont : un programme/fonds unique autonome; un département du secrétariat; ou une institution composite. [xii]
Avec la publication de la Note conceptuelle du Secrétaire général décrivant les différentes options institutionnelles proposées pour l'architecture de l'égalité des sexes, on espère que l'Assemblée générale examine ces options et finisse par prendre une décision. La durée de ce processus est incertaine mais la campagne GEAR poursuivra son action de plaidoyer afin de glaner les meilleurs résultats possibles pour les femmes.
Par: Rochelle Jones (AWID)
NOTES:
[i] Reforme des Nations Unies: http://www.reformtheun.org/index.php/issues/2063?theme=alt4
[ii] Choike. ‘The UN Reform… and what about women?’ (La réforme de Nations Unies ….où en sont les femmes?) http://www.choike.org/nuevo_eng/informes/5439.html
[iii] WEDO: http://www.wedo.org/campaigns.aspx?mode=beijingbeyondemail
[iv] Les principaux messages et la déclaration de la Campagne GEAR sont disponibles à l’adresse suivante: http://www.cwgl.rutgers.edu/globalcenter/policy/unadvocacy/GEAR%20Campaign%20Statement%20&%20Key%20Messages%2008%20eng.pdf
[v] Pour télécharger « Unis dans l'action », cliquez sur : http://www.un.org/events/panel/resources/pdfs/HLP-SWC-FinalReport.pdf
[vi] Architecture de l’égalité des sexes et les Réformes des Nations Unies. 17 juillet 2006. http://www.cwgl.rutgers.edu/globalcenter/policy/unadvocacy/Gender%20Equality%20Architecture%20and%20UN%20Reforms%20July%202006.pdf
[vii] Voir le site du CWGL: http://www.cwgl.rutgers.edu/globalcenter/policy/unadvocacy/gea.html#News
[viii] La première Note conceptuelle du Secrétaire général adjoint à l’Assemblée générale est disponible à l’adresse suivante: http://www.un.org/ga/president/61/letters/SDOC1599.pdf
[ix] Note conceptuelle du Secrétaire général aux états membres sur le soutien au Système actuel des Nations Unies sur l’égalité des sexes
[x] Note conceptuelle du Secrétaire général sur les options institutionnelles susceptibles de renforcer l’action des Nations Unies en matière d’égalité des sexes
[xi] Déclaration du Groupe de liaison à la 52e session de la CSW: http://www.cwgl.rutgers.edu/globalcenter/policy/unadvocacy/CSW%2008%20Linkage%20Statement.pdf
[xii] Les principales différences entre ces options, telles qu’elles sont exposées dans la Note conceptuelle (Voir Note 10), se situent au niveau de la gouvernance et du financement