France: L'essor des Salafistes en Banlieue inquiète policiers et Musulmans
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Le Monde Le prosélytisme pratiqué par ces tenants d'un islam rigoriste, influencé par les imams les plus radicaux d'Arabie saoudite, ne cesse de progresser, notamment parmi des jeunes désœeuvrés.
Les enquêteurs mettent en avant des risques de connexion avec des groupes terroristes.
Une scène étrange a eu lieu à la mosquée As-Salam d'Argenteuil, dans le Val-d'Oise, le 9 janvier en début de soirée. L'événement avait été annoncé par Internet, sur un forum musulman: "Cheikh Rabi Al-Madkhali donnera un cours par téléphone, mercredi à 19 heures, inch'Allah." A l'heure dite, quatre cents jeunes venus de toute la région parisienne étaient rassemblés dans le lieu de culte, vêtus pour la plupart d'une djellaba. Assis sur les tapis, ils ont écouté en silence une prédication en arabe classique, diffusée par une sono déficiente et traduite par un membre de l'assemblée. De temps à autre, la liaison téléphonique était interrompue, obligeant les organisateurs à rappeler leur interlocuteur, un ouléma saoudien qui s'exprimait depuis La Mecque.
Mehdi et Khaled faisaient partie de l'assistance. Un peu méfiants, sur la défensive, ils acceptent de parler de leur engagement religieux. Ils ont l'un et l'autre 29 ans et sont nés en France. Ils ne font pas de politique, expliquent-ils, mais ils suivent "le vrai islam", celui des salafs, littéralement des "prédécesseurs", c'est-à-dire des compagnons du prophète Mahomet et des deux générations qui leur ont succédé. Eux-mêmes se définissent comme "salafis" : "Notre seul but est d'imiter le Prophète, salut et bénédiction sur lui." Comme lui, ils se laissent pousser la barbe. Comme lui, ils portent le qamis (la djellaba) jusqu'à mi-hauteur du mollet. Comme lui, ils ne sortent pas sans un bâton de siwak, un bois abrasif qui sert à se nettoyer les dents. Ils calquent leur façon de vivre sur la Sunna, le vaste corpus qui rassemble les faits et dires attribués au Prophète (les hadiths).
Ils ne veulent pas qu'on les qualifie de wahhabites, et pourtant ils se réclament de l'islam rigoriste d'Ibn Taymiyya et d'Ibn Abdel-Wahhab, les inspirateurs de la monarchie saoudienne. Parmi les savants contemporains, ils révèrent particulièrement Abdel Aziz Ben Baz, l'ancien grand mufti d'Arabie saoudite, mort en 1999, et Nasiraddin Al-Albani, un spécialiste des hadiths, mort lui aussi il y a un an. Aujourd'hui, leur référence est le cheikh saoudien Rabi Al-Madkhali. Celui-ci s'est illustré en publiant un livre hostile à Sayyid Qotb, le penseur le plus radical des Frères musulmans, qu'il accuse d'avoir dévié sur le dogme.
Mehdi et Khaled n'aiment pas beaucoup les ikhwan, les Frères musulmans : "Ce sont des politiques, ils mentent, ils ont une double face." Ils n'aiment pas non plus le Tabligh, le grand mouvement piétiste et missionnaire de l'islam. Ils l'accusent de bid'a, c'est-à-dire d'innovation blâmable. "Les tablighis sont des ignorants", tranchent-ils.
Les deux jeunes se défendent d'être des extrémistes. Ils rappellent que le nouveau grand mufti d'Arabie saoudite, Abdoulaziz Al-Cheikh, a condamné les attentats du 11 septembre. Ils admettent cependant que certains groupes radicaux, comme le Groupe salafiste de prédication et de combat (GSPC) et le Takfir, se réclament du salafisme. "Contrairement à nous, ils critiquent les gouvernements et prêchent la révolte et la désobéissance. Ils considèrent que les autres musulmans sont des kouffars, des impies. Un groupe de ce genre existe à Sartrouville, dans les Yvelines. Mais les plus radicaux partent en Angleterre, pour rejoindre le cheikh Abou Hamza, à Londres."
Pour Mehdi et Khaled, ces groupes extrémistes ont dévié du véritable islam. Quant à eux, ils prônent l'obéissance aux pouvoirs publics.
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L'islam en France
voir séquence
Société Mais leur souhait le plus cher est de faire la hijra, l'émigration : de quitter la France pour s'installer dans un pays musulman. Quand on leur demande pourquoi ils ne partent pas tout de suite, ils évoquent "des raisons privées".
Mehdi a été l'un des premiers à suivre le minhaj salafi, la voie salafiste. Au début des années 1990, quelques prédicateurs influents ont lancé le mouvement. Cheikh Abdeladi à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine ; Cheikh Abdelkader à La Duchère, dans le 9e arrondissement de Lyon. Mais c'est à partir de 1995 que le salafisme est devenu véritablement visible. Aujourd'hui, il est présent dans toute l'agglomération parisienne, mais aussi à Roubaix, à Lyon, et dans plusieurs autres villes de province.
La mouvance salafiste regroupe un large éventail de tendances. La plus modérée est représentée par Aboubakr Al-Djazairi, un savant de Médine qui séjourne régulièrement en France et qui est l'auteur d'un livre intitulé La Voie du musulman (Ennour), devenu une sorte de catéchisme pour beaucoup de musulmans français. Les plus extrêmes se réclament du Takfir, un mouvement d'origine égyptienne dont le nom signifie "anathème". Entre les deux, plusieurs factions se déchirent sur des querelles byzantines touchant au dogme musulman.
"Le salafisme est devenu le cancer de la communauté musulmane !", lance Abdelali Mamoun, imam à la régie Renault et habitant du Val-Fourré, à Mantes-la-Jolie (Yvelines). Selon lui, le mouvement recrute surtout parmi les "hittistes" de la banlieue, ces jeunes dés¦uvrés qu'on appelle ainsi, dans le vocabulaire algérien, parce qu'ils n'ont rien d'autre à faire que de "tenir les murs" (hit en arabe).
"Contrairement aux autres organisations musulmanes, le salafisme ne demande aucun effort, à part un ritualisme rigide. Les jeunes qui s'en réclament ne font rien de la journée, et en plus ils se considèrent comme supérieurs aux autres musulmans !", peste l'imam Mamoun. A Mantes, les salafistes fréquentent la mosquée turque du centre commercial. Les femmes qui portent le niqab - la variante arabe du tchador iranien - y sont de plus en plus nombreuses.
Les salafistes ne gèrent pas de mosquée, à quelques exceptions près comme celle de La Duchère et la mosquée Tariq-Ibn-Zyad des Mureaux (Yvelines). Le plus souvent, ils jettent leur dévolu sur un lieu de culte dans lequel ils se rendent de plus en plus nombreux, jusqu'à ce que, lassés et gênés pour l'image de la mosquée, les propriétaires finissent par les en déloger. "Après le 11 septembre, les médias ont mis en cause les Frères musulmans et le Tabligh, s'étonne Hakim El-Ghissassi, directeur du magazine La Médina. Mais ils se sont trompé de cible : le vrai danger vient du salafisme..."
Moustapha Boukhateb est un musulman de Rouen, proche du Tabligh. Très pieux, il porte sur le front le "signe de la prosternation", une callosité acquise à force de prières. Lui non plus n'aime pas les salafis, qu'il appelle par dérision les "talafs", les égarés. "A Rouen, le Tabligh avait recruté une dizaine de jeunes, se souvient-il. Mais les vieux qui dirigent la mosquée les ont mis à l'écart. Ils ont été embrigadés par un salafi." A chaque fois, la méthode est la même, raconte Moustapha. Les salafistes abordent les jeunes à la sortie de la mosquée. Ils leur expliquent qu'ils sont dans l'égarement. Ils citent le hadith des 73 sectes : "Ma communauté se divisera en 73 sectes, aurait dit le Prophète. Toutes iront en enfer à l'exception d'une seule : celle qui suivra ma voie et celle de mes compagnons." Les salafistes affirment qu'ils sont la firqat an-najra, la "faction sauvée". Moustapha Boukhateb estime que 80 % des salafistes viennent du Tabligh.
Le rêve ultime de tous les salafistes est d'aller étudier en Arabie saoudite. Abdelali Mamoun raconte qu'un représentant saoudien est venu un jour à la grande mosquée de Mantes proposer des bourses pour l'université de Médine : "Quatre-vingts jeunes voulaient s'inscrire ! Ils étaient tellement nombreux qu'il a fallu leur donner des numéros de passage. Mais la sélection a été très dure et seulement deux jeunes ont été retenus." Selon Moustapha Boukhateb, qui y a séjourné, Médine est un chaudron de l'islamisme : "Ceux qui reviennent de là-bas sont complètement transformés. Ils ramènent des fatwas et des cassettes enregistrées par les cheikhs saoudiens les plus durs..."
De source diplomatique, il y aurait actuellement une cinquantaine de jeunes Français dans les universités de La Mecque et de Médine. Parmi eux, un tiers sont des convertis à l'islam.
Xavier Ternisien
Des sites Internet pour chaque tendance
Internet est devenu l'outil privilégié d'une galaxie salafiste peu organisée, et surtout divisée par des querelles doctrinales. Une véritable guerre de fatwas (au sens d'avis juridiques) est lancée sur les forums et sur les sites musulmans. Les livres, les cassettes et les textes des oulémas saoudiens sont mis à contribution pour soutenir les thèses des uns et des autres.
En France, la mouvance salafiste se divise principalement en deux tendances. L'une se réclame du Saoudien Rabi al-Madkhali et condamne les écrits de Sayyid Qotb. Elle se défend de faire de la politique et prône l'obéissance aux gouvernements en place. Elle est représentée par les sites comme Al-Baida et "Mise en garde contre l'ignorance". L'autre tendance est celle des "qotbistes", représentée par des sites tels que et le site, qui prône le djihad.
19 membres d'un réseau condamnés
Le 30 novembre 2000, le tribunal correctionnel de Paris a condamné 19 islamistes à des peines de prison allant de huit mois avec sursis à sept ans ferme pour leur participation à "une association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste". Accusés d'avoir fourni des armes, des voitures et des faux papiers au Groupe islamique armé (GIA) algérien, la plupart des prévenus étaient en outre soupçonnés d'appartenir à la branche européenne du Takfir wal-Hijra, ce mouvement extrémiste "qui a adhéré en 1999 à la mouvance internationaliste d'Oussama Ben Laden", comme l'a rappelé, au premier jour du procès, le juge Hervé Stéphan, sans que cet élément soit repris dans les réquisitions du procureur.
A l'audience, aucun d'entre eux n'a toutefois reconnu son appartenance à ce groupe présenté comme "sectaire, religieux et guerrier" par le chef de la section antiterroriste du parquet de Paris, Michel Debacq. Celui-ci avait à plusieurs reprises commenté les dénégations des prévenus en évoquant "le principe de base du Takfir, la dissimulation, par laquelle ses membres cachent aux mécréants la réalité de leur combat, le djihad".
Le Monde, article paru dans l'edition du 25.01.02
Mehdi et Khaled faisaient partie de l'assistance. Un peu méfiants, sur la défensive, ils acceptent de parler de leur engagement religieux. Ils ont l'un et l'autre 29 ans et sont nés en France. Ils ne font pas de politique, expliquent-ils, mais ils suivent "le vrai islam", celui des salafs, littéralement des "prédécesseurs", c'est-à-dire des compagnons du prophète Mahomet et des deux générations qui leur ont succédé. Eux-mêmes se définissent comme "salafis" : "Notre seul but est d'imiter le Prophète, salut et bénédiction sur lui." Comme lui, ils se laissent pousser la barbe. Comme lui, ils portent le qamis (la djellaba) jusqu'à mi-hauteur du mollet. Comme lui, ils ne sortent pas sans un bâton de siwak, un bois abrasif qui sert à se nettoyer les dents. Ils calquent leur façon de vivre sur la Sunna, le vaste corpus qui rassemble les faits et dires attribués au Prophète (les hadiths).
Ils ne veulent pas qu'on les qualifie de wahhabites, et pourtant ils se réclament de l'islam rigoriste d'Ibn Taymiyya et d'Ibn Abdel-Wahhab, les inspirateurs de la monarchie saoudienne. Parmi les savants contemporains, ils révèrent particulièrement Abdel Aziz Ben Baz, l'ancien grand mufti d'Arabie saoudite, mort en 1999, et Nasiraddin Al-Albani, un spécialiste des hadiths, mort lui aussi il y a un an. Aujourd'hui, leur référence est le cheikh saoudien Rabi Al-Madkhali. Celui-ci s'est illustré en publiant un livre hostile à Sayyid Qotb, le penseur le plus radical des Frères musulmans, qu'il accuse d'avoir dévié sur le dogme.
Mehdi et Khaled n'aiment pas beaucoup les ikhwan, les Frères musulmans : "Ce sont des politiques, ils mentent, ils ont une double face." Ils n'aiment pas non plus le Tabligh, le grand mouvement piétiste et missionnaire de l'islam. Ils l'accusent de bid'a, c'est-à-dire d'innovation blâmable. "Les tablighis sont des ignorants", tranchent-ils.
Les deux jeunes se défendent d'être des extrémistes. Ils rappellent que le nouveau grand mufti d'Arabie saoudite, Abdoulaziz Al-Cheikh, a condamné les attentats du 11 septembre. Ils admettent cependant que certains groupes radicaux, comme le Groupe salafiste de prédication et de combat (GSPC) et le Takfir, se réclament du salafisme. "Contrairement à nous, ils critiquent les gouvernements et prêchent la révolte et la désobéissance. Ils considèrent que les autres musulmans sont des kouffars, des impies. Un groupe de ce genre existe à Sartrouville, dans les Yvelines. Mais les plus radicaux partent en Angleterre, pour rejoindre le cheikh Abou Hamza, à Londres."
Pour Mehdi et Khaled, ces groupes extrémistes ont dévié du véritable islam. Quant à eux, ils prônent l'obéissance aux pouvoirs publics.
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L'islam en France
voir séquence
Société Mais leur souhait le plus cher est de faire la hijra, l'émigration : de quitter la France pour s'installer dans un pays musulman. Quand on leur demande pourquoi ils ne partent pas tout de suite, ils évoquent "des raisons privées".
Mehdi a été l'un des premiers à suivre le minhaj salafi, la voie salafiste. Au début des années 1990, quelques prédicateurs influents ont lancé le mouvement. Cheikh Abdeladi à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine ; Cheikh Abdelkader à La Duchère, dans le 9e arrondissement de Lyon. Mais c'est à partir de 1995 que le salafisme est devenu véritablement visible. Aujourd'hui, il est présent dans toute l'agglomération parisienne, mais aussi à Roubaix, à Lyon, et dans plusieurs autres villes de province.
La mouvance salafiste regroupe un large éventail de tendances. La plus modérée est représentée par Aboubakr Al-Djazairi, un savant de Médine qui séjourne régulièrement en France et qui est l'auteur d'un livre intitulé La Voie du musulman (Ennour), devenu une sorte de catéchisme pour beaucoup de musulmans français. Les plus extrêmes se réclament du Takfir, un mouvement d'origine égyptienne dont le nom signifie "anathème". Entre les deux, plusieurs factions se déchirent sur des querelles byzantines touchant au dogme musulman.
"Le salafisme est devenu le cancer de la communauté musulmane !", lance Abdelali Mamoun, imam à la régie Renault et habitant du Val-Fourré, à Mantes-la-Jolie (Yvelines). Selon lui, le mouvement recrute surtout parmi les "hittistes" de la banlieue, ces jeunes dés¦uvrés qu'on appelle ainsi, dans le vocabulaire algérien, parce qu'ils n'ont rien d'autre à faire que de "tenir les murs" (hit en arabe).
"Contrairement aux autres organisations musulmanes, le salafisme ne demande aucun effort, à part un ritualisme rigide. Les jeunes qui s'en réclament ne font rien de la journée, et en plus ils se considèrent comme supérieurs aux autres musulmans !", peste l'imam Mamoun. A Mantes, les salafistes fréquentent la mosquée turque du centre commercial. Les femmes qui portent le niqab - la variante arabe du tchador iranien - y sont de plus en plus nombreuses.
Les salafistes ne gèrent pas de mosquée, à quelques exceptions près comme celle de La Duchère et la mosquée Tariq-Ibn-Zyad des Mureaux (Yvelines). Le plus souvent, ils jettent leur dévolu sur un lieu de culte dans lequel ils se rendent de plus en plus nombreux, jusqu'à ce que, lassés et gênés pour l'image de la mosquée, les propriétaires finissent par les en déloger. "Après le 11 septembre, les médias ont mis en cause les Frères musulmans et le Tabligh, s'étonne Hakim El-Ghissassi, directeur du magazine La Médina. Mais ils se sont trompé de cible : le vrai danger vient du salafisme..."
Moustapha Boukhateb est un musulman de Rouen, proche du Tabligh. Très pieux, il porte sur le front le "signe de la prosternation", une callosité acquise à force de prières. Lui non plus n'aime pas les salafis, qu'il appelle par dérision les "talafs", les égarés. "A Rouen, le Tabligh avait recruté une dizaine de jeunes, se souvient-il. Mais les vieux qui dirigent la mosquée les ont mis à l'écart. Ils ont été embrigadés par un salafi." A chaque fois, la méthode est la même, raconte Moustapha. Les salafistes abordent les jeunes à la sortie de la mosquée. Ils leur expliquent qu'ils sont dans l'égarement. Ils citent le hadith des 73 sectes : "Ma communauté se divisera en 73 sectes, aurait dit le Prophète. Toutes iront en enfer à l'exception d'une seule : celle qui suivra ma voie et celle de mes compagnons." Les salafistes affirment qu'ils sont la firqat an-najra, la "faction sauvée". Moustapha Boukhateb estime que 80 % des salafistes viennent du Tabligh.
Le rêve ultime de tous les salafistes est d'aller étudier en Arabie saoudite. Abdelali Mamoun raconte qu'un représentant saoudien est venu un jour à la grande mosquée de Mantes proposer des bourses pour l'université de Médine : "Quatre-vingts jeunes voulaient s'inscrire ! Ils étaient tellement nombreux qu'il a fallu leur donner des numéros de passage. Mais la sélection a été très dure et seulement deux jeunes ont été retenus." Selon Moustapha Boukhateb, qui y a séjourné, Médine est un chaudron de l'islamisme : "Ceux qui reviennent de là-bas sont complètement transformés. Ils ramènent des fatwas et des cassettes enregistrées par les cheikhs saoudiens les plus durs..."
De source diplomatique, il y aurait actuellement une cinquantaine de jeunes Français dans les universités de La Mecque et de Médine. Parmi eux, un tiers sont des convertis à l'islam.
Xavier Ternisien
Des sites Internet pour chaque tendance
Internet est devenu l'outil privilégié d'une galaxie salafiste peu organisée, et surtout divisée par des querelles doctrinales. Une véritable guerre de fatwas (au sens d'avis juridiques) est lancée sur les forums et sur les sites musulmans. Les livres, les cassettes et les textes des oulémas saoudiens sont mis à contribution pour soutenir les thèses des uns et des autres.
En France, la mouvance salafiste se divise principalement en deux tendances. L'une se réclame du Saoudien Rabi al-Madkhali et condamne les écrits de Sayyid Qotb. Elle se défend de faire de la politique et prône l'obéissance aux gouvernements en place. Elle est représentée par les sites comme Al-Baida et "Mise en garde contre l'ignorance". L'autre tendance est celle des "qotbistes", représentée par des sites tels que et le site, qui prône le djihad.
19 membres d'un réseau condamnés
Le 30 novembre 2000, le tribunal correctionnel de Paris a condamné 19 islamistes à des peines de prison allant de huit mois avec sursis à sept ans ferme pour leur participation à "une association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste". Accusés d'avoir fourni des armes, des voitures et des faux papiers au Groupe islamique armé (GIA) algérien, la plupart des prévenus étaient en outre soupçonnés d'appartenir à la branche européenne du Takfir wal-Hijra, ce mouvement extrémiste "qui a adhéré en 1999 à la mouvance internationaliste d'Oussama Ben Laden", comme l'a rappelé, au premier jour du procès, le juge Hervé Stéphan, sans que cet élément soit repris dans les réquisitions du procureur.
A l'audience, aucun d'entre eux n'a toutefois reconnu son appartenance à ce groupe présenté comme "sectaire, religieux et guerrier" par le chef de la section antiterroriste du parquet de Paris, Michel Debacq. Celui-ci avait à plusieurs reprises commenté les dénégations des prévenus en évoquant "le principe de base du Takfir, la dissimulation, par laquelle ses membres cachent aux mécréants la réalité de leur combat, le djihad".
Le Monde, article paru dans l'edition du 25.01.02