WLUML Bulletin – numéro 8
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Dans ce numéro, nous sommes heureuses du lancement du programme « Les femmes revendiquent et redéfinissent les cultures : affirmation des droits sur le corps, le soi et les espaces publics », une entreprise menée conjointement par Femmes vivant sous lois musulmanes et l’Institut IWE, qui rassemblera des femmes du monde musulman pour leur permettre d’examiner et de débattre de la façon dont les systèmes culturels, traditionnels et religieux sont utilisés comme instruments de légitimation de l’oppression qu’elles subissent.
Les débats actuels sur le voile comme symbole féminin de l’identité musulmane ou sur les codes vestimentaires sont des exemples de ces systèmes à l’oeuvre. La controverse discrète entre le président des États-Unis, Barak Obama et le président français Nicolas Sarkozy est symptomatique. Le 4 juin 2009, Obama déclarait devant le parlement égyptien que le « gouvernement des États-Unis est allé en justice pour protéger le droit des femmes et des filles de porter le hijab et pour punir ceux qui les priveraient ce droit. » Deux jours plus tard, en visite officielle en France, M. Obama avait exhorté son homologue à lever l’interdiction du port du voile dans les écoles publiques. M. Sarkozy avait rétorqué : “Le voile intégral est un signe de l’assujettissement des femmes. » Une commission parlementaire composée de divers partis politiques a été mise en place pour mener des investigations sur le port du voile intégral en France et pour préparer des mesures répressives, en accord avec d’autres pays européens.
Un tel débat est perturbant à plus d’un titre car la vraie question est la suivante : « Pourquoi les femmes devraientelles porter le voile pour que leur identité musulmane soit reconnue? », plutôt que « Pourquoi interdire le voile ? » En plus de la question problématique du voile, il y a celle des vêtements en général pour les femmes. Au Soudan, des femmes activistes ont été traduites en justice pour avoir porté le pantalon en public et menacées de flagellation publique. De même, au Nigeria, l’État fédéral tente de légiférer contre tout vêtement (féminin) qu’il considère indécent ; et au Koweït et en Arabie saoudite, des codes vestimentaires restrictifs qui affectent non seulement les femmes mais aussi les minorités sexuelles sont mis en application. Le livre à paraître d’Ayesha Salma Kariapper sur les vêtements des femmes musulmanes au Royaume-Uni présente des perspectives intéressantes sur l’analyse de la situation dans ce pays.
Il est toutefois difficile d’accepter le port obligatoire du voile pour des raisons religieuses et culturelles, tout comme il est difficile d’accepter une interdiction juridique, car les deux démarches sont le produit du contrôle de l’État, des autorités religieuses et de la société sur le corps des femmes. Le recours à la loi pour préserver l’imposition culturellement justifiée de codes vestimentaires est une attaque contre les droits fondamentaux des citoyens. Il est donc fondamental pour les femmes et les hommes de prendre leurs distances par rapport aux contraintes socioculturelles des sociétés antérieures afin de se concentrer sur les nouveaux débats du 21ème siècle.
Fatou Sow
Coordonnatrice du Bureau international de coordination de
Femmes vivant sous lois musulmanes (WLUML ICO)