Afghanistan: Les femmes afghanes espèrent du progrès dans le sillage des élections
«J'étais très heureuse de pouvoir m'inscrire sur les listes et j'irai voter, pour avoir mon mot à dire sur le destin de mon pays», assure-t-elle, enthousiaste.
De nombreuses associations et ONG ont récemment lancé une campagne pour presser cinq millions de femmes, sur 17 millions d'inscrits au total, d'aller voter jeudi pour les élections présidentielle et provinciales.
Mais sur les 41 candidats à la présidence, deux seulement sont des femmes. Et deux aussi sur les 82 prétendants aux deux postes de vice-présidents. Pire: elles sont 328 parmi les 3.196 candidats aux sièges des conseils de province, soit à peine plus de plus de 10%.
Il y a eu des progrès importants depuis la chute des talibans, estime néanmoins Riahana, 23 ans, qui votera, elle, pour la seconde fois jeudi.
«Notre mère Farima n'a jamais pu rêver d'une telle opportunité», dit cette étudiante en arabe à l'université de Kaboul.
«Sous les talibans, elle était enfermée à la maison», se souvient-elle. Sous le régime fondamentaliste, Farima n'a pas hésité à braver la bastonnade publique en osant inviter une enseignante pour donner des cours à ses quatre filles.
Ainsi, deux des filles de Farima sont à l'université aujourd'hui et les deux autres impatientes de les imiter. Mais seulement 20% des jeunes qui ont la chance de faire des études supérieures en Afghanistan sont des filles.
«Il y a eu beaucoup de progrès pour les femmes, tout comme pour les hommes, en matières de droits politiques, dont le droit de vote est d'ailleurs l'un des plus fondamentaux», admet Arezo Qanih, qui travaille dans une petite association à Kaboul, le Centre de formation et d'éducation des femmes et des filles pauvres en Afghanistan.
«Mais nous voulons davantage de postes dans les sphères de décision pour que ces progrès puissent s'intensifier», plaide-t-elle, regrettant que les changements depuis 2001 ne soient pas «suffisants».
Pas équitables non plus: si les femmes vivant dans les grandes villes iront nombreuses voter, il n'en ira certainement pas de même pour celles des campagnes - la très grande majorité - qui vivent sous le joug des traditions et la menace des talibans, dont l'insurrection s'est considérablement intensifiée ces deux dernières années.
Des candidates aux conseils provinciaux ont d'ailleurs reçu des menaces de mort, notamment dans le sud et l'est, bastions des rebelles fondamentalistes.
Le 12 avril, la députée provinciale Sitara Achikzaï, une enseignante et infatigable défenseur des droits de la Femme, a ainsi été assassinée à Kandahar, dans le sud, berceau des talibans.
Consciente de l'extrême conservatisme qui prévaut dans la société afghane, et pas seulement chez les talibans, Riahana admet qu'«il faut du temps, des campagnes publiques» pour changer les mentalités.
Mais elle se réjouit de ce qu'elle a pour l'heure: «C'est une situation vraiment heureuse pour nous, nous pouvons prendre part à la politique», lance-t-elle.
Lynne O'DONNELL
16 août 2009
Source: Cyberpresse.ca