Guinée: Cinq ans avec sursis pour l'excision de leurs filles en Guinée
Source:
Libération Sory a 4 ans lorsqu'elle se fait exciser, en 1997. «Ma mère a cru me faire plaisir en "coupant" la petite. Je n'étais pas au courant», se défend le père de l'enfant.
En 1998, c'est au tour de Massata, 9 ans, de partir en Afrique et de revenir excisée.
Amadou, Guinéen de 57 ans, est renvoyé devant la cour d'assises de Paris avec ses deux femmes, Fatoumata et Ramata. Tous trois sont accusés de complicité de violences ayant entraîné une mutilation sur mineures de moins de 15 ans.
Leurs parents ont-ils délibérément envoyé leurs filles françaises chez leur grand-mère paternelle en Guinée pour y être mutilées en sachant que la loi française interdit cette pratique ? Pour le père, un tailleur musulman d'origine peule, l'excision «est une affaire de femmes». Pourtant, interrogées sur la signification de cet acte, ni Fatoumata ni Ramata n'ont d'explications claires : «C'est la religion, la coutume.»
«Interdit légal». Dès le début du procès, les avocats de la défense avaient annoncé qu'ils ne plaideraient pas l'alibi culturel. Me Rein, l'avocate de Fatoumata, rappelle toutefois qu'«il n'est pas facile d'intégrer un interdit légal quand on a en miroir une tradition. Les mères qui pratiquent l'excision se considèrent comme de bonnes mères. Toutes les femmes n'ont pas la même capacité à se révolter». Selon Me Weil-Curiel, avocate de la Commission pour l'abolition des mutilations sexuelles (Cams), partie civile, cette affaire est symptomatique d'«un changement de stratégie des parents consistant à faire exciser les petites au pays, en leur absence. Ils pensent ainsi échapper aux poursuites».
A l'audience, entre pudeur et volonté de ne pas s'enfoncer dans les contradictions, les trois accusés s'expriment peu. Comme étrangers à leur procès. La présidente est parfois perplexe : «Pourquoi avoir envoyé Massata toute seule en Guinée ? N'aviez-vous pas conscience du risque ?» Fatoumata répond, tête baissée : «Je pensais qu'elle était trop grande et qu'ils croiraient que ce serait déjà fait.» Les témoins se succèdent. Des experts médecins et psychiatres relatent les souffrances indicibles et les conséquences irrémédiables de la mutilation. Des associations tentent de démontrer que les accusés, en France depuis des années, n'ont pu ignorer les campagnes d'information et de prévention au sein des services de PMI (Protection maternelle et infantile) depuis plus de vingt ans. D'après l'avocat général, «ce procès est un monument dédié à l'obscurantisme et à l'imbécillité humaine».
Promesse. Ces propos ont-ils emporté la conviction du jury ? Amadou, Fatoumata et Ramata ont été condamnés à cinq ans de prison avec sursis. Sory et Massata, aujourd'hui âgées de 10 et de 14 ans, n'ont pas assisté au procès. Toutes deux vont recevoir 15 000 euros de dommages et intérêts. Avec, en prime, une promesse de leurs parents : leurs trois petites soeurs ne seront pas envoyées en Afrique.
© Libération
Leurs parents ont-ils délibérément envoyé leurs filles françaises chez leur grand-mère paternelle en Guinée pour y être mutilées en sachant que la loi française interdit cette pratique ? Pour le père, un tailleur musulman d'origine peule, l'excision «est une affaire de femmes». Pourtant, interrogées sur la signification de cet acte, ni Fatoumata ni Ramata n'ont d'explications claires : «C'est la religion, la coutume.»
«Interdit légal». Dès le début du procès, les avocats de la défense avaient annoncé qu'ils ne plaideraient pas l'alibi culturel. Me Rein, l'avocate de Fatoumata, rappelle toutefois qu'«il n'est pas facile d'intégrer un interdit légal quand on a en miroir une tradition. Les mères qui pratiquent l'excision se considèrent comme de bonnes mères. Toutes les femmes n'ont pas la même capacité à se révolter». Selon Me Weil-Curiel, avocate de la Commission pour l'abolition des mutilations sexuelles (Cams), partie civile, cette affaire est symptomatique d'«un changement de stratégie des parents consistant à faire exciser les petites au pays, en leur absence. Ils pensent ainsi échapper aux poursuites».
A l'audience, entre pudeur et volonté de ne pas s'enfoncer dans les contradictions, les trois accusés s'expriment peu. Comme étrangers à leur procès. La présidente est parfois perplexe : «Pourquoi avoir envoyé Massata toute seule en Guinée ? N'aviez-vous pas conscience du risque ?» Fatoumata répond, tête baissée : «Je pensais qu'elle était trop grande et qu'ils croiraient que ce serait déjà fait.» Les témoins se succèdent. Des experts médecins et psychiatres relatent les souffrances indicibles et les conséquences irrémédiables de la mutilation. Des associations tentent de démontrer que les accusés, en France depuis des années, n'ont pu ignorer les campagnes d'information et de prévention au sein des services de PMI (Protection maternelle et infantile) depuis plus de vingt ans. D'après l'avocat général, «ce procès est un monument dédié à l'obscurantisme et à l'imbécillité humaine».
Promesse. Ces propos ont-ils emporté la conviction du jury ? Amadou, Fatoumata et Ramata ont été condamnés à cinq ans de prison avec sursis. Sory et Massata, aujourd'hui âgées de 10 et de 14 ans, n'ont pas assisté au procès. Toutes deux vont recevoir 15 000 euros de dommages et intérêts. Avec, en prime, une promesse de leurs parents : leurs trois petites soeurs ne seront pas envoyées en Afrique.
© Libération