Algérie: Ce qui change dans le code de la famille: A défaut d’égalité, plus de protection pour les femmes

Source: 
Le Quotidien d'Oran
La femme semble davantage protégée dans le nouveau code de la famille mais la traduction du principe constitutionnel d’égalité entre les deux sexes devra attendre...
L’ordonnance n° 05.02 du 27 février 2005 modifiant le code de la famille de 1984 sera sans doute marquée par la question du wali et la réponse, équivoque, apportée par le nouvel article 11 (voir notre édition d’hier).
Les débats et les batailles qui ont entouré le sujet auront fait passer au second plan les autres amendements. La question du wali renvoie incontestablement au débat sur le principe d’égalité affirmé par la constitution, mais également au référent religieux tout aussi présent dans le texte fondamental qui fait de l’Islam religion et interdit au législateur d’aller à l’encontre de la morale islamique. Une quadrature du cercle qui, à défaut d’une rupture au niveau du droit, ne sera résolue que dans la pratique.

Dans ce domaine, l’article 11 introduit des traitements différents entre une femme majeure et une femme mineure, ce qui constitue un petit progrès, même si le principe d’égalité homme - femme ne se retrouve pas dans le texte. Il reste que les amendements introduits apportent en général davantage de protection pour la femme. L’ordonnance tranche de manière claire et sans équivoque pour mettre fin au scandale des femmes jetées dans la rue avec leurs enfants après le divorce. L’article 72 fait obligation au père d’assurer à la bénéficiaire du droit de garde un logement décent ou le loyer. Mieux, la femme qui bénéficie du droit de garde reste dans le domicile conjugal jusqu’à ce que le père s’acquitte de ses obligations en matière de logement. Il n’y a pas matière à interprétation. Le nouveau texte tend par ailleurs à limiter, voire à empêcher les mariages coutumiers en précisant dans son article que la «Fatiha» qui accompagne les fiançailles, ne constitue pas un mariage. Elle ne peut l’être que si elle accompagne des fiançailles en «séance contractuelle». Il s’agit moins d’un changement que d’une précision supplémentaire allant dans le sens de la restriction du mariage coutumier. Autre changement dans le nouveau texte: l’âge du mariage devient le même (19 ans) pour les hommes et pour les femmes, alors qu’il était respectivement de 21 et de 18 ans.

Autre nouveauté introduite par l’article 7 bis, l’obligation pour les futurs époux de présenter des documents médicaux pour prévenir les risques. La polygamie est reconnue dans les «limites de la charia» mais le nouvel article 8 introduit une présence du juge qui doit autoriser le nouveau mariage en vérifiant la réalité du consentement des épouses et que l’époux a un «motif justifié» et qu’il est apte à assurer «l’équité et les conditions nécessaires à la vie conjugale». Le rôle du juge devient primordial car il aura à vérifier et à apprécier sur des situations concrètes. Le nouvel article 19 est modifié afin de citer expressément la polygamie et le travail de l’épouse comme des clauses pouvant être stipulées dans le contrat de mariage. La possibilité pour le futur conjoint de se faire représenter par un mandataire dans la conclusion de l’acte de mariage est définitivement abrogée. Pour contracter mariage, le futur époux doit être présent physiquement. On peut supposer qu’il s’agit d’éviter des mariages forcés pour les femmes.

Autre changement, les obligations de l’époux et de l’épouse ne sont pas mentionnées séparément et elles sont les mêmes pour chacun. Les articles 38 et 39 de l’ancien code qui séparaient entre les obligations de l’époux et de l’épouse et qui exigeaient de celle-ci «d’obéir à son mari et de lui accorder des égards en sa qualité de chef de famille» sont abrogés. Ces articles étaient souvent cités comme une consécration juridique indigne de l’inégalité entre les deux époux. Désormais, les obligations des deux conjoints se trouvent dans le seul article 36 et sont strictement les mêmes. Le droit de garde est rééquilibré en faveur du père qui vient désormais en seconde position après la mère et avant la grand-mère maternelle. Dans le texte amendé, le père venait en quatrième position après la mère, la grand-mère maternelle et la tante maternelle.

M. Saâdoune
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