Burkina Faso: Consternation à Ouagadougou après l'excision de seize fillettes

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AFP
"Je sais que l'excision est interdite, j'ai voulu rendre service", a simplement déclaré à la télévision Adama Barry les yeux embués de regrets après avoir excisé, cette semaine à Ouagadougou, seize fillettes de 2 à 10 ans.
Cette récidiviste de 63 ans a excisé les fillettes à Tanghin, un quartier à la périphérie de Ouagadougou, semant la consternation au sein de la population de plus en plus hostile à cette mutilation devenue un délit pénal au Burkina-Faso.
"C'est honteux que cela se passe dans la capitale, car nous avons souvent traité les villageois d'ignorants", se révolte Martine, 40 ans vendeuse de bananes, elle-même excisée à 4 ans.

"Chaque génération a ses problèmes, les nôtres c'est l'emploi et un bon mari, pas l'excision!", lance Kadi, étudiante en médecine.

Encore sous le choc, des habitants de Tanghin ont expliqué à l'AFP que les 16 enfants ont été excisées l'une après l'autre, sous une pluie battante au petit matin.

"Quand nous sommes arrivés vers 9H00, il y avait juste du sang et des saletés sur les lieux", explique Antoine Sanou du Comité national de lutte contre la pratique de l'excision (CNLPE).

"Cela s'est passé dans l'arrière-cour, là où elle égorgeait ses poulets", raconte une voisine.

D'après les gendarmes, c'est un appel téléphonique anonyme sur un numéro vert qui a alerté le CNLPE.

Récidiviste, l'exciseuse a déjà purgé des peines de 4 à 6 mois de prison ferme pour excision.

"Je suis veuve et nécessiteuse, même la gratification de 250 Fcfaeuro) par fillette excisée ne m'a pas encore été versée par les parents", se lamente-t-elle à la télévision où parlent régulièrement des personnes impliquées dans ce type d'affaires afin que ces arrestations servent d'exemple.

L'exciseuse a indiqué que c'étaient les grand-mères des fillettes qui étaient venues chez elle, avec une lame, la suppliant d'exciser les enfants.

"Quand j'ai fini, le sang n'a même pas coulé: j'ai juste coupé les extrémités, puis appliqué une poudre de plantes sauvages pour prévenir l'hémorragie", a-t-elle expliqué.

Toutefois, le gynécologue de la clinique où les victimes ont été admises est formel: "quinze souffrent d'une ablation partielle ou totale du clitoris. Chez celle de deux ans, le clitoris a été enlevé et les petites lèvres ont été emportés" par la lame de rasoir.

Ivre de colère, Mme Dialla, mère d'une des victimes, accuse: "c'est la coutume, ce sont les grand-mères qui décident de les exciser, nous on a aucun droit sur nos enfants".

Hortense Palm, la secrétaire permanente du CNLPE réclame "la peine maximum" contre la vieille exciseuse et ses complices, toutes des proches des victimes.

Elles encourent de 6 mois à 3 ans de prison ferme et des amendes de 150.000 à 900.000 Fcfa (225 à 1.375 euros).

Cette tragédie survient alors que le gouvernement s'était réjoui de la chute en 2002 de 66% à 40% du taux de prévalence de l'excision dans le pays.

L'OMS dénonce une "opération barbare" qui touche désormais un nombre croissant de fillettes de 0 à 4 ans.

"La gangrène est toujours là", affirme Antoine Sanou, soulignant qu'au moins quatre secteurs de la capitale sont des zones "à risques" où les exciseuses ont pignon sur rue pendant les vacances scolaires.

Pour les associations féminines burkinabé, le combat ne doit pas se limiter aux exciseuses traditionnelles, il doit se poursuivre dans les hôpitaux où des personnels pratiquent l'excision dans la clandestinité.

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